Escarres - Conduite à tenir en prévention

EVITER LES SITUATIONS A RISQUE

Voici une liste des situations à risque à éviter au quotidien pour prévenir l’apparition d’escarres :

  • Éviter le glissement du patient dans son lit : les plis des draps peuvent suffire pour traumatiser la peau. Ex : frottement de la peau contre la literie (effet de râpe).
  • Ne jamais frotter énergiquement ou masser à pleine main les zones à risque. Par exemple, éviter les frottements énergiques de la peau lors de la toilette (irritant physique identique à une brûlure).
  • Ne pas déplacer la personne en la faisant glisser sur son lit : cela provoque frottements et cisaillements de la peau. Il faut soulever la personne, au besoin en utilisant un drap.
  • Eviter la pression prolongée sur une zone donnée, en position assise ou couchée : alterner le plus possible les positions.
  • Eviter la macération dans les couches (urines, selles, pommades) et l’irritation cutanée : les selles, l’urine, le savon mal rincé et la sueur sont des irritants chimiques.
  • Éviter le contact prolongé avec des objets qui pourraient blesser : fermetures, boutons, sonde urinaire… Un corps étranger, arrivant par négligence dans le lit ou le fauteuil de la personne soignée, peut fragiliser l’épiderme et provoquer une escarre.
  • Éviter tout changement de température brutal sur les zones à risque : proscrire le chauffage avec un sèche-cheveux par exemple ou les massages avec des glaçons.

 

MINIMISER LA PRESSION

Une intervention préventive sous forme de réduction / soulagement de la pression grâce à des plannings de mobilisation / repositionnement des personnes à risque est particulièrement important1. En effet, le changement régulier de position toutes les deux heures, de jour comme de nuit (en évitant au maximum les frictions et cisaillements) permet d’alterner les zones d’appui et de soulager la pression.

L’utilisation de matelas ou de coussins anti-escarre permet de diminuer la pression exercée par le poids du corps en la répartissant sur une surface d’appui plus large et d’espacer les repositionnements toutes les 4 heures1. Si le quota de personnel est insuffisant, une mobilisation au moins pendant la toilette, après la sieste, avant ou après le souper et aux changes de nuit est indispensable.

En pratique - Les différentes positions2

Position allongée sur le côté à 30° (décubitus semi-latéral à 30°)

Plusieurs coussins sont placés sous la tête et au niveau des fesses pour incliner le corps à 30°.

Des coussins sont aussi positionnés entre les jambes pour empêcher le frottement au niveau des talons et des chevilles.

> Diminution de la pression sur les points d’appui (talons, hanches et sacrum)

Position semi-assise avec le buste à 30° maximum

 Relever les pieds avec un coussin pour éviter le glissement.

Cette position expose le sacrum, toutefois le risque d’escarre est faible.

Position assise au lit

À limiter au temps des repas

Position assise au fauteuil

Incliner le dossier vers l’arrière pour limiter les pressions.

Placer un coussin carré à la base du dos et un coussin rectangulaire sous la plante des pieds mais également sous les cuisses pour prévenir tout glissement vers l’avant.

Et voici un exemple de planning de mobilisation journalière :

Lors de l’élaboration du plan de soins, la fréquence du repositionnement doit être déterminée par l’évaluation globale du patient et non uniquement par un score de risque.

Télécharger un planning de mobilisation à remplir ou retrouvez comment faciliter votre pratique dans nos outils

 

 

PRENDRE EN COMPTE LA DOULEUR

La douleur est un facteur pouvant entraîner une diminution de la mobilité notamment chez les patients atteints de maladies chroniques comme l’arthrite, la sclérose en plaques, le cancer et les lésions musculosquelettiques1. Toute diminution de la mobilité, en tant que résultat de cette douleur, peut augmenter le risque de développement d’escarre1.

À noter que l’analgésie et les sédatifs peuvent déprimer le système nerveux central et entraîner une réduction de la vigilance, de l’activité et de la mobilité, altérant ainsi la capacité de la personne à réagir efficacement aux crises ischémiques1.

En général, les directives cliniques sur la prévention des escarres ne traitent pas de l’évaluation de la douleur. Cependant, récemment l’importance de traiter les problèmes de douleur dans le contexte de prévention des escarres a été rapportée1.

À ce jour aucun outil d’évaluation n’est spécifiquement recommandé1 mais différents outils peuvent être utilisés :

  • Outils d’auto-évaluation pour patient communiquant (EVA, EN, EVS...)
  • Outils d’hétéro-évaluation pour patient non communiquant (ECPA, Algoplus,

EOC...)

Des recherches additionnelles sont nécessaires sur la douleur et son impact en tant que facteur de risque pour le développement d’escarres.

 

 

PROTÉGER L’INTÉGRITÉ DE LA PEAU

1. Hydrater la couche cornée pour la protéger contre les dommages mécaniques.

En effet, lorsque l’hydratation de la peau est diminuée, une perte de souplesse apparait et le risque de développer des fissures augmente1.

En pratique - Hydrater la peau

  • Assurez une hydratation optimale de la peau en utilisant des hydratants lubrifiants, non sensibilisants, à pH équilibré ou des crèmes avec une teneur minimale en alcool. L’application des hydratants se fait sur les zones de peau sèche, en prenant soin de ne pas frotter ni masser les proéminences osseuses.
  • Éviter les massages sur les protubérances osseuses. Le massage sur les protubérances osseuses pourrait être nocif. En effet, une diminution du flux sanguin vers la peau et de la température cutanée après le massage, ainsi qu’une dégénérescence des tissus ont été observées chez les patients1.
  • Ne pas réaliser de frictions aux points d’appui : même si le parfum de l’alcool de lavande est agréable, l’alcool par son action vasoconstrictrice dessèche la peau.
  • Ne pas utiliser de pommades qui favorisent la macération cutanée.

2. Éliminer fréquemment les déchets métaboliques

Tels que l’urine et les matières fécales pour prévenir l’irritation de la peau1

En pratique - Nettoyer la peau

  • Utiliser un nettoyant doux pour la peau au pH équilibré et non sensibilisant.
  • Lors du nettoyage de routine de la peau et lors de souillures, utiliser de l’eau tiède (plutôt que chaude) pour minimiser sécheresse et irritation.
  • Minimiser la force et les frottements sur la peau lors du nettoyage.
  • Ne pas faire de massages au savon qui « encrassent » et irritent la peau.
  • Éviter l’alternance du chaud - froid (sèche-cheveux, glaçons) qui fragilise la peau et peut provoquer des brûlures...
  • Ne pas appliquer d’antiseptique coloré qui ne présente aucun intérêt dans la prévention des escarres et de plus masque les signes de début d’escarre.

3. Protéger la peau de l’humidité excessive et de l’incontinence. 

La peau humide est fragile. En effet, elle est plus susceptible aux frottements et aux déchirures, en particulier lors de la toilette. De plus, la peau humide a tendance à adhérer au linge de lit, pouvant générer des dommages lors des mobilisations. Il est également important de souligner que la peau humide est plus sensible aux irritations, aux éruptions cutanées et aux infections, telles que le Candida.

Quand la source de l’humidité ne peut pas être contrôlée, l’utilisation de barrières de protection et de produits absorbant l’humidité est essentielle. Une gestion efficace de la continence est une composante essentielle des soins de la peau. Lorsque l’incontinence urinaire a contribué ou peut contribuer à une escarre, une sonde urinaire peut être nécessaire pour une courte durée1.

En pratique - Protéger la peau

  • Utiliser des barrières de protection anti-humidité. Lors de l’application de crèmes ou barrières anti-humidité, il est recommandé de le faire par effleurage = massage superficiel sans appuyer sur la peau.

 

  • Évaluer et gérer la continence avec des coquilles absorbantes ou des étuis péniens chez les hommes, des tampons absorbants ou des couches qui absorbent et retiennent l’humidité chez les femmes. Proposer un bassin/urinoir en combinaison avec le programme de remobilisation. Chaque fois que possible : Traiter la cause > consulter le médecin.

 

Comment et quand faire un effleurage ?

  • Un effleurage doit être très doux, circulaire, réalisé avec la paume de la main (sans gant) sur les points d’appui avec un produit de prévention délivré par la pharmacie afin de favoriser la circulation sanguine.
  • Faire pénétrer la crème de protection par un effleurage pendant 3 min.

Ce temps permet de favoriser la détente et d’entretenir une relation d’échange et de confort entre le patient et le soignant.

  • Renouveler au moins 3 fois par jour.
References

1. Registered Nurses’ Association of Ontario (RNAO). Clinical Best Practice Guidelines: Risk Assessment and Prevention of Pressure Ulcers (Revised 2011 Supplement). 2005. Available from: https://rnao.ca/sites/rnao-ca/files/Risk_Assessment_and_Prevention_of_Pressure_Ulcers.pdf

2. Battu V. Escarres, conditions d’une bonne démarche préventive. Actualités pharmaceutiques. 2018;576:57-59.

Pour aller plus loin

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